• Défi du Samedi en avait marre des interviews insipides des sportifs après match (courses, combats...) ! Souriez, vous êtes pressentis pour rédiger leurs déclarations. Soumettez au jury 3 textes :

    1/ en cas de défaite du sportif
    2/ en cas de match nul
    3/ en cas de victoire

    "On a gagné, on a gagné, on a gagné" braille l'équipe de foot de Trifouillis les Gonesses sur l'air des lampions.

    "Désolée Laurence, pas moyen d'en tirer autre chose, il faut croire que ce n'est pas la baballe qu'ils ont mis dans les buts, mais leur cerveau"

    "On a gagné, on a gagné, on a gagné"

    "Bon d'accord les gars on a compris, on a compris, on a compris, navrée Laurence, c'est contagieux"

     

    "Match nul, bon d'accord, match nul, mais il faut quand même le reconnaître nous étions les meilleurs, en fait l'autre équipe a fait de l'anti-jeu pour nous empêcher de marquer"

    "Voilà Laurence, c'était la déclaration de l'équipe de Trifouillis les Gonesses, je vais voir l'équipe de Trifouillis les Sarcelles maintenant et je vous transmets de suite son interview"

    "Match nul, bon d'accord, match nul, mais il faut quand même le reconnaître nous étions les meilleurs, en fait l'autre équipe a fait de l'anti-jeu pour nous empêcher de marquer"

    "Excusez-moi Laurence, mais je crois que les deux équipes ont le même service de communication"

     

    "Bonsoir Laurence, voilà l'équipe de Trifouillis les Gonesses a perdu le match qui aurait pu lui éviter la relégation, je vais essayer d'obtenir les impressions de l'entraîneur"

    "Monsieur l'entraîneur, votre équipe a perdu ce match à quoi cela est-il dû à votre avis ?"

    "... ... ..."

    "Oui, certes, posons la même question au capitaine de l'équipe. Alors capitaine 10 à zéro quelles conclusions en tirez vous ?"

    "... ..."

    "Bien et vous les membres de l'équipe, comment comptez-vous remonter la pente ?

    "... ..."

    "... ..."

    "... ..."

    "Chère Laurence, je fais maintenant une dernière tentative auprès du goal. Alors, pourquoi aviez-vous les doigts en caoutchouc ce soir ?

    "... ..."

    "Désolée Laurence, mais il semblerait que cette défaite reste comme une arête de poisson en travers de la gorge de l'équipe et qu'elle leur cause une extinction de voix, je vous rends donc l'antenne"

    Ainsi que vous pouvez aisément le deviner, je suis une super fan de foot !!!

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  • Petite Laine va bientôt quitter le dos de son mouton, elle l’a appris de la bouche de l’humain appelé berger. Après, elle a entendu plein de rumeurs, mais toutes disent qu’elle va devenir quelque chose d’autre et puis encore autre chose après comme la chenille qui se transforme en papillon. Petit Laine attend donc avec impatience cette aventure.

    Voilà, ça y est elle est détachée du dos de son mouton. Elle passe dans un tas d’endroits bizarres qui font du bruit, qui sentent étrangement, on lui fait subir tout un tas de choses et un jour, comme promis Petite Laine est métamorphosée. Elle n’arrive pas à bien se voir, mais elle se retrouve dans une grande boite avec d’autre petites laines transformées comme elle, d’ailleurs elles lui disent qu’elle leur ressemble. Ca lui convient tout-à-fait. Une de ses voisines lui indique que maintenant elles s’appellent toutes Garance, ça a un rapport avec sa nouvelle couleur et ça lui plait bien à Petite Laine.

    Les voilà qui arrivent dans un endroit nouveau, tout lumineux, avec à perte de vue d’autres petites laines de toutes les couleurs, c’est le Paradis sûrement se dit notre Petite Laine Garance.

    Et commence l’attente, jusqu’à un jour où une petite humaine toute ronde, déjà âgée, aux cheveux blancs et aux yeux clairs entre dans la boutique, apportant avec elle une odeur à la fois douce et piquante (note de la rédactrice, pour ceux qui sont en âge, vous vous souvenez de l’odeur de poudre de riz de vos grands-mères ?). Elle regarde toutes les petites laines étalées devant elle, et bonheur elle la choisit elle, Petite Laine. En route pour une nouvelle aventure.

    L’humaine s’appelle Grand-Mère et elle présente Petite Laine à une autre humaine encore plus petite qui s’appelle Petite-Fille. Grand-Mère s’est mis en tête d’apprendre à tricoter à Petite Fille, c’est pour ça que Petite Laine est là. Seulement voilà, les humains sont bizarres, ils ne fonctionnent pas tous de la même manière. Grand-Mère est droitière et Petite-fille gauchère, et malgré toute leur bonne volonté à toutes les deux, Petite-Fille n’arrive pas à faire tenir Petite Laine sur les drôles de baguettes en fer que Grand-Mère lui a donné. Petite-Fille s’énerve, râle, envoie tout balader (note de la rédactrice, j’invente là hein, je ne me suis sûrement pas comportée comme ça. Si ? Non !!!).

    Et voilà Petite Laine toujours en écheveau qui part avec Petite-Fille qui essaiera à de nombreuses reprises de la faire tenir sur ces sacrées baguettes sans succès, Alors Petite Laine atterrit dans un tiroir. Et elle y reste, encore et encore. Heureusement pour elle, Petite Laine n’a pas la notion du temps qui passe. Régulièrement le tiroir s’ouvre, mais jamais pour elle.

    Enfin, un jour, une main l’attrape et l’emmène sur une table où trône déjà d’autres petites laines de toutes les couleurs et de drôles d’objets en plastique qui s’emboîtent l’un dans l’autre. Petite-Fille, qui d’ailleurs n’est plus si petite, prend Petite Laine et commence à l’entourer autour de ses morceaux de plastique qu’elle réunit ensuite. Puis scricht, scricht, les ciseaux coupent Petite Laine, un autre morceau de laine vient retenir les fibres et voilà qu’elle est devenue une chose toute ronde, toute douillette.

    Mais son aventure ne s’arrête pas là, plein d’autres boules sont fabriquées, des pompons ça s’appelle. Petite-Fille, qu’il faut maintenant appeler Maman, les accroche à des barres et le tout est suspendu au-dessus d’un berceau dans lequel un tout petit humain Petit-Garçon rit de bonheur en tendant ses menottes pour essayer d’attraper Petite Laine qui se balance au-dessus de lui, et Petite Laine est heureuse, les rumeurs étaient vraies elle est devenue quelque chose de merveilleux.

    Et ce n’est pas tout, un autre pompon de Petite Laine est cousu sur le bonnet que Grand-Mère, devenue Arrière-Grand-Mère a tricoté pour Petit Garçon. Et d’autres morceaux d’elle vont devenir broderies de Petit Garçon à Maman pour une fête qu’on appelle Fête des Mères, d’autres vont s’incorporer aux modelages de Petite-Fille qui si elle ne sait toujours pas tricoter, sait quand même se servir de ses mains pour d’autres choses.

    Bien sûr le mobile avec les pompons a été rangé, Petit-Garçon est devenu Grand-Garçon. Mais, Maman espère bien qu’un jour elle deviendra Grand-Mère et qu’elle pourra ressortir Petite Laine pour la donner avec ses sœurs à un autre Petit-Garçon ou à une autre Petite-Fille.

    Bref, Petite Laine, dans toutes ses métamorphoses continue de vivre un peu partout et elle est très heureuse de son sort.


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  • J'avais écrit ce petit texte il y a plus d'un an, et oui mon côté fourmi je stocke, en fait je n'avais pas trouvé l'illustration qui allait bien. C'est maintenant chose faite grâce à une photo de Mima.


    L'enfant joue.

    Il s'invente des mondes et des aventures.

    Il est bien tout au fond du jardin à la lisière de la forêt qui s'insinue jusqu'à lui.

    Il a découvert avec bonheur cette étrange racine qui, au gré de son imagination, devient cheval, vaisseau spatial, camion de pompier ou simplement fauteuil pour rêvasser.

    Jour après jour, il revient près de son compagnon de jeu.

    Jour après jour, celui-ci envahi de plus en plus son univers.

    Il l'entend lui parler de mondes au-delà de son monde, d'espaces qu'il peut lui faire découvrir s'il veut bien lui faire confiance.

    Bercé par cette voix qui lui devient peu à peu plus familière que celle de ses parents, l'enfant doucement s'enfonce dans cette galaxie de rêves.

    Ses parents s'inquiètent, trouvent qu'il passe trop de temps seul au fond du jardin, parlant à ce morceau de bois aux formes torturés et qu'ils voudraient éradiquer tant il leur semble une menace. Mais, le petit a l'air tellement heureux qu'ils n'osent intervenir.

    Une nuit, l'enfant entend son compagnon l'appeler.

    A pas de loup, il se lève pour le rejoindre, il s'approche de la souche, la caresse, la laisse l'enlacer, l'absorber.

    Au matin, les parents fous d'inquiétude cherchent l'enfant.

    Dix fois ils passent près de ce morceau de bois.

    Dix fois, ils pensent voir leur enfant assis sur la racine.

    Dix fois, ils repartent en hurlant son nom.

    Peu à peu l'espérance s'effiloche. Pourtant, l'espoir n'arrivant pas à mourir ils resteront dans cette maison à attendre le retour de leur fils.

    Doucement ils vieilliront près de cette souche qu'en fin de compte, sans savoir pourquoi ils n'ont jamais pu se résoudre à faire arracher peut-être parce que leur enfant l'aimait tant.

    Et du fond de ce morceau de tronc, deux yeux, enfantins à jamais, les observent parfois avec tendresse avant de se clore à nouveau sur leur monde parallèle fait de rêves.

     

    Et pour ceux qui n'auraient pas repérer l'enfant, la photo de plus près

     


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  • Pour le défi du samedi, le jouteur écrira*  (au choix) : une lettre/ un discours / un règlement / un mode d’emploi / une recommandation / un plaidoyer / une harangue / une charte / un avis / un sermon... Toutefois, il se pliera** à certaines exigences :

    • dans un premier temps, son texte sera tout empreint de bon sens et de réalisme ;
    • progressivement, le lecteur devra percevoir quelques scories*** dans le discours ;
    • le final devra appartenir à l’ordre du grand n’importe quoi.

    De plus, chacun s’obligera à donner cinq**** notes de bas de page de longueur décroissante, et, ultime défi, profitera de ce 79e pour communiquer à ses camarades de jeu, de la manière qu’il lui plaira, l’une de ses mensurations***** sans avoir aucunement besoin de justifier pourquoi celle-là plutôt qu’une autre.

    * écriture manuscrite ou assistée par ordinateur*
    ** de la meilleure grâce qui lui soit donnée**
    *** sans aucune restriction de taille***
    **** disons quatre plus une****
    ***** nul ne vérifiera*****
    ***********
    *******
    ***
    *



    MODE D’EMPLOI DU SHAVE HAIR TERMINATOR

    Vous voulez en finir avec les poils disgracieux !
    Vous venez d’acquérir pour ce faire notre épilateur électrique (1)

    Pour utiliser au mieux votre appareil (2) voici quelques conseils d’utilisation.

    Nous vous conseillons de faire votre épilation après un peeling qui aura permis d’exfolier la couche supérieure de votre épiderme.

    Assurez-vous toutefois que vos jambes soient parfaitement sèches avant utilisation de notre épilateur. D’autre part, n’utilisez pas l’appareil sous l’eau (3).

    Maintenant vous pouvez mettre notre épilateur sous tension.

    Pour cela : branchez le transformateur A dans votre prise de courant classique, puis la fiche B du transformateur dans l’emplacement C de votre épilateur (4).

    Ensuite, poussez le bouton D sur la position « on », la position « off » vous permettra d’éteindre votre appareil.

    Pour l’épilation elle-même, maintenez la peau de votre jambe bien tendue avec une main, mais évitez quand même de l’arracher complètement, puis procédez en partant de la cheville et en remontant vers la cuisse avec un petit mouvement rotatif de gauche à droite ou de droite à gauche selon vos convictions politiques.

    Si un repli de peau se coince dans les pincettes, évitez de tirer. Arrêtez l’épilateur, puis avec un cutter scalpez la peau surnuméraire. Si vous n’arrivez pas à arrêter l’hémorragie afférente à l’opération, dirigez-vous vers les urgences ou appelez le Samu si la perte sanguine est trop importante.

    Dans tous les cas, n’oubliez pas de désinfecter votre épilateur pour éviter que des odeurs de chair nécrosée ne se développent.

    Pour les petits poils rebelles, ainsi que pour le maillot, nous vous conseillons d’utiliser les produits proposés dans votre mallette de rangement.

    Soit vous pouvez araser le tout à l’aide du papier de verre gros grain E, soit s’il y a encore des résistances, vous pouvez frotter les poils récalcitrants avec un coton imbibé de la solution à base d’acide chlorhydrique contenue dans la fiole F.

    Ne pas oublier ensuite de bien rincer et, afin d’éviter le développement de boutons ou de rougeurs malvenues, pensez à enduire les parties épilées avec la crème G constituée de la molécule révolutionnaire MNVNAPM (5).

    Votre épilateur peut également s’occuper de vos aisselles et de votre moustache, toutefois, veuillez noter que notre société se dégage de toute responsabilité en cas d’ablation de la lèvre supérieure ou du nez.

    Et maintenant Chère Cliente, Cher Client, bonne épilation !
     

    (1) Autant vous le dire vous avez fait le bon choix, nous sommes les plus performants sur le marché pour régler vos problèmes de poils.
    (2) Nous avons fait un travail technique impeccable, ce n’est pas pour que l’utilisiez à tort et à travers.
    (3) Sauf si vous tenez à vous électrocutez un bon coup ou à modifier votre coupe de cheveux.
    (4) Appareil réservé aux personnes maîtrisant l’alphabet.
    (5) Mais Non Vous N’Avez Pas Mal.

     


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  • En italique ce que vous avez lu hier.

    Depuis plusieurs jours déjà, je faisais halte dans ce petit bourg. Je n’avais prévu qu’une étape, mais, je ne sais pourquoi, le calme et la sérénité de l’endroit m’avaient retenue.

    J’avais pris l’habitude d’aller me promener dans les bois et la campagne environnants. A chacun de mes retours, l’hôtesse me demandait avec un petit sourire en coin : « Alors avez-vous rencontré des personnes intéressantes ? » J’avais l’impression qu’elle attendait une réponse bien précise, mais laquelle ?

    Ce matin là, je dirigeai mes pas vers la forêt et optai pour un sentier que je n’avais pas encore exploré. Le silence m’environnait, tout juste troublé par moment par le chant lointain d’un oiseau. Il régnait une atmosphère étrange comme faite d’attente. Du coin de l’œil, j’aperçus une minuscule sente qui s’enfonçait plus profondément sous la futaie, elle semblait m’appeler. Curieuse je me laissai tenter.

    Brusquement, je me trouvai face à des ruines, les vieilles pierres disparaissaient en partie sous la végétation foisonnante. Elles semblaient se cacher aux regards. J’entrepris de l’explorer. Des restes de pilastres luttaient avec les ronces, un chemin de pierre faisait le tour d’un jardin revenu à l’état sauvage, au centre le reste de ce qui ressemblait à un grand crucifix cherchait à s’élancer vers le ciel. Soudain, j’aperçus un homme assis sur une large pierre détachée d’un mur, vêtu d’un ample vêtement sombre, le visage caché par un capuchon. Un instant décontenancée par cette présence, je finis par m’approcher et je le saluai :

    « Bonjour, quel étrange endroit pour un cloître. »

    Il parut ne pas m’avoir entendue, il restait là sans bouger, puis sa voix s’éleva dans le calme de la forêt :

    « Je vais vous raconter la légende de cet endroit. »

    Sans détourner la tête, il me fit signe pour que je prenne place à ses côtés. Un peu sidérée par son attitude, mais curieuse d’en savoir plus, je m’installai près de lui et laissai mon regard errer sur les vieilles pierres.

    Il reprit :

    « Il y a fort longtemps, vivait ici une petite communauté de moines. Le plus jeune était herboriste. C'était un jeune homme rêveur et tendre, nouvellement arrivé dans la communauté pour remplacer le vieil herboriste qui venait de rejoindre son créateur.

    Dans le village voisin vivait une jeune femme, belle comme un rayon de soleil. Elle possédait un jardin de simples qu'elle mettait à la disposition de ses voisins en leur concoctant potions et pommades pour soulager leurs maux. En dépit de sa beauté, elle ne suscitait nulle convoitise de la part des hommes, nulle jalousie de la part des femmes. Sa bonté et sa joie de vivre faisaient d'elle un ange, aux yeux des villageois.

    Un jour le jeune moine vint à passer devant ce jardin, pour lui rempli de merveilles. Le voyant admiratif devant ses plantations la jeune femme sortit, le salua gentiment :

    « Bonjour mon frère, mes plantes vous intéresseraient-elles ? »

    Rougissant, il lui retourna son salut et ils commencèrent à échanger quelques recettes.

    Le jeune moine rentra au monastère, des rêves dans les yeux et de la joie au cœur. La vie continua un moment ainsi sans heurts, les jeunes gens continuant à se rencontrer pour confronter leurs connaissances, leur amitié devenant rayonnante.

    Mais voilà qu'un jour, le destin arriva sous les traits d'un inquisiteur venu faire une inspection dans la région. C'était un bel homme mais son visage était tellement sévère que tous tremblaient en le voyant et personne n'osait le regarder dans les yeux. Tous, sauf la jeune femme qui l'accueillit comme elle accueillait tout le monde, avec gentillesse et douceur.

    Las, sa spontanéité se retourna aussitôt contre elle. Pour l'inquisiteur cette femme, qui brusquement faisait battre son cœur et se lever dans son esprit des pensées impures, ne pouvait être qu'une sorcière.

    Alors il se mit à harceler les villageois, posant question après question. Elle sortait à la pleine lune, n'est-ce pas ? Elle empoisonnait le bétail, n'est-ce pas ? Elle avait de nombreux amants, n'est-ce pas, n'est-ce pas ?

    Mais, personne n'avoua quoique ce soit d'aussi terrible. Bien au contraire, tous insistèrent sur le fait qu'elle ne préparait que des potions bénéfiques, qu'elle aidait tout un chacun. Hélas, en voulant bien faire, ils allèrent trop loin. L'un indiqua que le jeune herboriste du monastère n'hésitait pas à la consulter et qu'ils échangeaient des plantes, l'autre précisa que la jeune femme soulageait les femmes en gésine avec des pommades calmantes, une autre qu'elle connaissait des plantes qui permettaient d'espacer des grossesses épuisantes. Cela suffit bien sûr à l'inquisiteur.

    Pas de doute c'était une sorcière, elle pervertissait un moine, elle allait à l'encontre des préceptes du Seigneur qui disait "croissez et multipliez-vous" et "tu donneras la vie dans la douleur".

    Devant ses voisins anéantis, mais qui devant les armes de l'escorte n'osèrent rien faire, elle fut arrêtée et traînée dans le monastère pour y subir la question. Le jeune herboriste voyant le sort réservé à son amie tenta d'intervenir, l'inquisiteur bien sûr n'attendait que ce faux pas pour l'emprisonner lui aussi.

    Malgré ce que le monstre leur fit subir, ils clamèrent leur innocence et la pureté de leurs sentiments. Mais la jalousie, l'envie et la colère de l'homme de dieu réclamaient d'être assouvies.

    Un matin, tous les villageois furent contraints de se rendre au monastère. Dans une clairière, les moines prostrés attendaient devant un bûcher. Installé sous un dais, l'inquisiteur rendit son verdict. La jeune femme avait été convaincue de commerce avec le démon et elle serait brûlée vive, l'herboriste quant à lui resterait emprisonné à vie.

    La "sorcière" fut tirée de sa prison, affaiblie par les sévices infligés, elle arriva soutenue par deux gardes. L'herboriste, dans le même état, fut traîné sous le dais et jeté aux pieds de son accusateur.

    L'inquisiteur, voyant la réprobation dans les yeux de tous, fit semblant de faire preuve de mansuétude. Si elle avouait devant tous qu'elle était bien une sorcière, il la ferait étrangler avant de livrer son corps aux flammes.

    Elle se redressa, fière et belle. « Je suis innocente, Dieu en jugera et vous punira ». En rage, l'homme ordonna qu'elle soit livrée au supplice. Deux gardes, avec maintes précautions, la lièrent au poteau, sur leur visage se lisait une peine infinie. Un brandon enflammé fut approché des fagots.

    Au moment même où le feu prenait, l'herboriste, malgré ses nombreuses blessures, se releva,  et s’emparant d’une épée il la planta dans le corps du tortionnaire qui s'écroula. Puis, sans que personne n'essaie de l'arrêter, il se jeta dans le brasier pour rejoindre sa bien-aimée.

    Il l'enlaça sous les imprécations de l'inquisiteur mourant. Une colonne d'air entoura les deux jeunes gens, les séparant du feu. Leurs corps s'unirent, se fondirent l'un dans l'autre et à leur place un grand oiseau blanc s'éleva au dessus du bûcher en flamme. Il effleura l'inquisiteur du bout de l'aile et celui-ci commença à se recroqueviller, à brûler sur place en poussant des hurlements. Puis son corps tomba en poussière et le vent l'emporta.

    Personne n'intervint, ni ses gardes, ni les moines, ni les villageois, tous le regardèrent agoniser en murmurant « Le jugement de Dieu est rendu ».

    Levant les yeux, ils regardèrent le bel oiseau voler de plus en plus haut et dans leur cœur un grand bonheur se répandit.

    Voilà l'histoire de l'herboriste et de la sorcière. Je peux aussi vous dire qu'après cet événement, les moines préfèrent partir vers d'autres monastères et celui-ci tomba en ruine peu à peu. Le village, quant à lui, sembla bénéficier au cours des siècles d'une étrange protection, il fut épargné par les maladies, les famines, les guerres. Tous pensent que l'oiseau blanc veille sur lui. »

    La triste voix du conteur, s’effilocha dans le silence revenu. Je me levai et regardai les ruines d'un autre œil. Je restai pensive quelques instants, essayant d’imaginer cet embrasement d’amour. Un mouvement dans le ciel attira mon regard et j’eus l’impression de voir tournoyer l'oiseau fabuleux. Prise d’un étourdissement, je ramenai vivement mes yeux vers mon compagnon qui s’était levé. Je m’aperçus alors qu’il était vêtu d’une bure monastique. Je jetai un dernier coup d’œil aux ruines de l’ancien monastère et murmurai à l’intention de mon mystérieux narrateur :

     « Merci, mon frère, pour cette merveilleuse légende ». Mais, en me retournant à nouveau, je m’aperçus qu’il avait disparu, je ne l’avais pas entendu s’éloigner et je ne le vis nulle part.

    Songeuse, je repris le chemin de l'auberge. En me voyant arriver, l'hôtesse ne me posa pas la question rituelle, et se contenta de me sourire. J'avais fait la rencontre qu'elle attendait.


    Voilà la très belle photo de Casy qui m'a inspiré cette histoire. Elle était dans ma tête depuis un moment lorsque Fanes de Carottes a proposé comme jeu d'écriture le thème "Bûcher" et voilà 1 + 1 = 2. C'est Infolio qui m'a aidée à mettre mon texte en bon ordre de marche. Et puis ce texte est dédiée à toutes ces milliers de femmes qui ont été brûlées, noyées, pendues sous le fallacieux prétexte de sorcellerie simplement parce que des hommes avaient peur d'elles qui revendiquaient une liberté qui leur était interdite ou qui tout simplement se refusaient à eux. Et il est dédiée également à tout ces femmes de notre époque qui sont battues, lapidées, vitriolées parce qu'elles aussi font peur au sexe dit fort.










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